Les industries maghrébines mises à mal

  • Création : 10 mai 2006
Le combat est inégal, les possibilités de relancer les activités industrielles sont très minces et les éventualités de concurrencer les géants chinois et occidentaux sont nulles. D'éminents experts algériens et étrangers ont appuyé, au cours d'un colloque à Alger sur le développement industriel des pays méditerranéens du Sud, ce lourd constat.

Que ce soit en Algérie, au Maroc ou en Tunisie, la situation est la même : le secteur industriel se meurt, laminé par l'économie de marché.

« Il y a un véritable paradoxe dans la gestion du secteur industriel en Tunisie, alors que nous avons tout fait pour préserver la capacité compétitive de l'industrie, l'ouverture du marché et la signature de l'accord de libre-échange avec l'Union européenne a tout remis en question. Depuis 2002, le secteur industriel tunisien s'effrite », explique le professeur Dimassi, expert tunisien. Il enchaîne : « Les mesures prises par le gouvernement tunisien pour assurer la compétitivité de produits industriels se sont révélées infructueuses. Nous n'avons, au final, même pas réussi à préserver le marché local. Le secteur industriel tunisien a aujourd'hui perdu les deux béquilles, à savoir les deux marchés (national et international). »

Alors qu'elle avait marqué une légère avance dans les années 70, l'Algérie partage aujourd'hui avec son voisin tunisien la déroute du secteur industriel. Mustapha Mekideche, consultant algérien, impute cette situation à l'absence de ce qu'il appelle la « logique productiviste endogène » des entreprises.

Il regrette que le processus d'industrialisation soit resté inachevé et que les entreprises restructurées n'aient plus la taille critique pour financer et amortir les dépenses de développement et de renouvellement. « Les restructurations ont coûté cher (près de 21 milliards de dollars, selon l'étude Booz Allen) avec des effets sociaux ayant entraîné des pertes de savoir-faire industriel ainsi que 400 000 emplois perdus, selon l'UGTA », assène-t-il. Une ré-industrialisation est d'autant plus pressante, aux yeux de l'expert algérien, que les autres sources de revenus en Algérie ne peuvent suffire au développement du pays.

Alors que l'Algérie importe l'équivalent de 20 milliards de dollars par an, elle n'exporte que 900 millions de produits hors hydrocarbures. « La désindustrialisation représente dans notre pays près de 7% du PIB, y compris dans le secteur privé, où sur un potentiel de 45% de production, seulement 75% sont utilisés », nous apprend M. Mekideche. Pis, en Algérie, presque tous les secteurs rencontrent des difficultés qui les empêchent d'avancer. D'après le conférencier, le secteur de l'agriculture algérien ne pourra au mieux qu'assurer la sécurité alimentaire (3,5 milliards $). Le secteur des services est déficitaire. Le BTPH - en croissance forte - a des difficultés à obtenir ses parts de marché. Le secteur des hydrocarbures est, quant à lui, peu créateurs d'emplois et obéit à des logiques fortes d'insertion internationales.

Bref, l'Algérie doit à tout prix revoir sa stratégie économique. La politique industrielle algérienne devra, d'après M. Mekideche, s'appuyer sur l'Etat en tant que promoteur du développement et porteur d'une ambition industrielle nationale. Le succès de cette stratégie industrielle suppose, d'après lui, une volonté politique forte forgée autour d'un projet national de (re)industrialisation, un consensus autour de la liquidation progressive des rentes qui ont un effet d'éviction sur l'effort productif ainsi que l'émergence des capacités d'entreprenariat algérien à travers la concertation et l'appui des pouvoirs publics, le changement des mentalités et une ambition plus forte du secteur privé algérien. En dépit d'une situation qui paraît désastreuse, les experts algériens, tunisiens et marocains préfèrent garder espoir

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