Dr. Amine BENSEMMANE, Président du Groupe de réflexion Filaha innov’ ( GRFI) « Valoriser notre production agricole nationale : AGROFOOD, nouvelle thématique de l’industrie agroalimentaire au SIPSA-FILAHA 2022 »production agricole nationale « AGROFOOD
- Création : 30 août 2021
Dans cet entretien, Amine BENSEMMANE dresse le bilan du Sipsa-Filaha de l’édition 2019 et émet les perspectives pour 2022. Il revient également sur les mesures dédiées à l’agriculture et l’agro-industrie dans le plan d’action du gouvernement. Des mesures inscrites selon lui dans la même lignée des recommandations des experts de la fondation Filaha Innov’ éditées, ces dernières années.
Agroligne : Quelles sont les nouveautés par rapport à la dernière édition de 2019 ?
Dr. BENSEMMANE Amine : L’édition 2019 fut difficile d’un point de vue économique pour notre pays pour les raisons que nous connaissons tous. Le SIPSA-FILAHA s’est résolument tenu en dépit d’annulations, et du report de plusieurs évènements. Conscients que dans ce contexte des plus difficiles, l’agriculture et la dynamique agricole restent un pivot majeur du développement économique de notre pays. Notre événement s’est tenu avec un nombre respectable d’exposants internationaux et une baisse cependant, de 20 % concernant le national. Nous avons enregistré plus de 470 exposants versus 550 exposants en 2018.
L’innovation et l’agriculture intelligente étaient au menu de l’année 2019, cette année nous rentrons de plein pied dans un concept que nous avons déjà initié depuis 2014 & 2015 en l’occurrence la valorisation des produits agricoles dans l’agro-industrie. En 2013, avec le FCE présidé à l’époque par Monsieur Réda Hamiani, nous avons engagé des synergies fertiles entre la stimulation de la productivité et le développement des filières agricoles, et sa valorisation dans l’agro-industrie, ce qui est capital pour la sécurité alimentaire de notre pays. C’est pour cette raison que nous reviendrons à la charge en 2022 avec la thématique AGROFOOD : développement et valorisation de l’industrie agroalimentaire et des produits alimentaires depuis le champ jusqu’au consommateur final, avec une volonté forte de promouvoir le développement des outils et des techniques de production et de transformation agro-alimentaires du produit agricole algérien. L’édition 2019 s’est également distinguée par l’organisation du premier concours Filaha Innov Awards, qui a abouti à la création de l’incubateur FILAHA INNOV’ avec plus de 20 Start-up porteuses de projets innovants dans le secteur agroalimentaire. Aujourd'hui, notre incubateur FILAHA INNOV' est agréé et labellisé dans le secteur de l'agriculture, agro-industrie, pêche et aquaculture et agro écologie.
Comment s'annonce la prochaine édition de SIPSA-Filaha & Agro Food ?
Après l’absence de ses deux éditions en physique dues à la pandémie de COVID-19 et des impacts très forts de la crise, venant aggraver la sécurité sanitaire et alimentaire de notre pays, le SIPSA-FILAHA&AGROFOOD 2020, est reportée en mars 2022 du 14 au 17 au Palais des Expositions –Safex.
Un 2ème concours SIPSA INNOV’ sera de nouveau lancé et ouvert sur le MAGHREB à destination des start-up, des chercheurs, des universitaires, des centres de recherches et écoles, des agriculteurs et des opérateurs. Il est à noter que l’utilisation de nouvelles technologies numériques ouvrent des perspectives prometteuses concernant la promotion de l’agriculture dite intelligente.
En mettant en exergue cette thématique, le salon SIPSA poursuit sa contribution dans l’identification des stratégies les plus adaptées afin d’augmenter durablement la productivité et la résilience des cultures et oeuvre dans la continuité de la consolidation des bases de notre sécurité alimentaire qui constitue la ligne de mire de la politique nationale Algérienne en la matière.
Les forums organisés en marge du salon SIPSA-FILAHA s’appuient principalement dans cette édition sur les recommandations émises lors des antécédents forums.
Quelle lecture faites-vous du plan d'action du gouvernement concernant l’agriculture et l’agroalimentaire ?
Les enjeux d’une politique de la sécurité alimentaire et nutritionnelle en Algérie. "De la Promotion des produits agricoles, et le concept d’intégration des filières en amont et en aval, rôle de la recherche et l’innovation en adéquation avec l’économie agricole » est une priorité majeure du gouvernement qui a récemment pris conscience du rôle de la recherche et de l’innovation, et que l’université enfin doit coller aux réalités, et aux problématiques du terrain dans l’agriculture en favorisant l’intégration des filières de l’amont vers l’aval. "La fondation et son groupe de réflexion Filaha Innov’ (GRFI) a toujours constitué une force de proposition militant pour la limitation de l’importation des produits agricoles en faveur de la production nationale et la promotion de l’outil industriel pour la mise à disposition d’un produit répondant aux standards internationaux et donc, potentiellement exportable dans un second temps.
Le plan d’action du gouvernement comporte trois objectifs majeurs :
Réduire les importations des produits agricoles en valorisant toutes les filières agricoles, organiser l’interprofession, le mouvement associatif, les Start- up et l’innovation, le mouvement coopératif et tous les clusters professionnels, promouvoir les niches à l’export, les produits du terroir, et les produits maraîchers en hors saison, dans les régions sahariennes, l’utilisation de nos ressources hydriques optimales pour développer une agriculture dynamique et durable à contre saison et organiser la logistique à l’export. Ce qui nous a conduits   dans le cadre de nos forums de Filaha Innov’ à appuyer ce secteur Export dans le forum SIAFIL EXPORT en 2019 et 2021, avec le soutien du ministère du commerce.
Comment assurer la réussite de ce programme et quel serait l'apport justement des opérateurs étrangers ?
Nous enregistrons déjà des actions salutaires de certaines décisions du gouvernement priorisant le secteur agricole dans cette dynamique de la nouvelle république. C’est cette ouverture du foncier agricole pour des projets innovants avec des partenaires étrangers qui peuvent maintenant détenir plus de 49 % du capital d’une société créée avec des partenaires locaux et aussi le souhait d’une libéralisation du secteur de l’équipement et du machinisme agricole, pour pouvoir booster la productivité, en utilisant une mécanisation adaptée à chaque filière agricole. L'agriculture intelligente, la digitalisation et l'utilisation des nouvelles technologies appliquées à la modernisation du secteur sont les outils que nous souhaitons mettre en exergue dans nos forums webinaires pour mettre en valeur certaines filières agricole d'une importance stratégique telles les céréales, la filière laitière, l'agriculture saharienne, l'agriculture de montagne, l'agro écologie et les niches des productions agricoles qui doivent irrémédiablement diminuer les importations au profit de la production nationale.
La filière lait continue à faire débat avec les crises récurrentes, que proposez-vous justement dans le cadre de la fondation Filaha pour améliorer les rendements laitiers et réduire les importations ?
Le débat sur la filière lait refait surface en 2022, au Salon SIPSA. Le Forum FIPLAIT est remis en action chaque année, par la fondation Filaha où les experts de cette filière n’ont pas cessé de faire des recommandations à juste titre pour développer et assainir mais surtout trouver des solutions idoines pour diminuer l’importation de la poudre de lait qui est responsable à l’heure actuelle d'une hémorragie de devises publiques.
Le Dr Soukehal, expert LAIT au GRFI Filaha Innov et ancien conseiller au Ministère de l’agriculture avait déjà en 2001 préconisé dans un rapport d’expertise à la FAO que pour réduire la facture d’importation du lait en poudre, il fallait développer l’élevage laitier intensif. Il faudra, évidemment, développer l’élevage laitier intensif en encourageant l’élevage hors sol, appelé à être approvisionné par une puissante industrie d’aliments de bétail en granulés.
Mais cela reste très insuffisant. Ce qui implique l’introduction des mesures économiques et politiques d’accompagnement. Nous devons notamment protéger notre production nationale contre la politique de dumping que pratiquent les pays exportateurs de la poudre de lait.
Tous les pays y compris les USA, subventionnent leur lait au niveau d’un des maillons de la filière. Il serait souhaitable qu’avant la mise en œuvre intégrale des règlements de l’OMC d’exploiter la phase transitoire qui nous est accordée, par un système para fiscal dont les revenus serviront à financer les aides consenties à nos éleveurs et ce, pour les mettre à niveau dans le domaine de la compétitivité. Il y a lieu de rappeler, aussi, que dans tous les pays développés, les usines laitières ont été un instrument de promotion au profit des éleveurs laitiers.
Dans notre pays, cette industrie a certes, réglé le problème d’approvisionnement des populations urbaines, mais elle a été un facteur de blocage pour la production locale à cause particulièrement, de la politique des prix administrés, laquelle a favorisé, indirectement l’utilisation de la poudre de lait importée au détriment de la collecte du lait local. Il s’agit d’aller donc, vers la nécessaire privatisation des filiales du groupe industriel public Giplait qui sont des sociétés par actions. Il serait souhaitable qu’une partie de ces actions, la majorité de préférence, soit vendue aux éleveurs qui livrent leur lait à la laiterie. Le partenariat laiterie-éleveurs permettrait ainsi d’impliquer ces derniers dans la valorisation de leur matière première et renforcerait la cohérence technique et économique de la filière face à la concurrence internationale à laquelle on n’y échappera pas. Nous reviendrons sur ces questions lors du Forum Fiplait en marge du salon SIPSA-Filaha & Agro Food, qui se tiendra, rappelons-le au Palais des Expositions des Pins Maritimes d’Alger- Safex du 14 au 17 mars 2022 en présentiel et en version digitale.
Rédaction Agroligne